Kipling est déjà un nouvelliste reconnu, en 1889, lorsqu'il envoie ces
esquisses japonaises au Pioneer d'Allahabad. Entre l'Inde qu'il quitte après
sept ans de carrière journalistique et la fruste Amérique qu'il appréhende,
cette escale au Japon est pour lui un enchantement de tous les instants.
L'apesanteur qu'il ressent dans le "pays artiste [...] habité par de petits
enfants", déclenche en lui un état de grâce qui l'arrache à la causticité de
ses premiers récits. Loin de prétendre au statut de témoignage ethnographique,
ces crayonnages sur le vif sont l'oeuvre d'un faux naïf qui s'adonne
avec brio à l'écriture égotiste.
Il est accompagné dans ses pérégrinations par un "professeur-photographe",
contrepoint à la fois réel et rhétorique, qui lui permet de libérer
sa plume des clichés et des lourdeurs livresques. Flânant avec un humour
désinvolte entre les chromos, Kipling montre qu'un écrivain en voyage
peut éviter la bêtise s'il est assez artiste pour voir sans savoir, assez humain
pour aimer sans comprendre et assez modeste pour rire de son ignorance.
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