Il n’y a pas de guerre, pas de génocide, pas d’abandon de populations entières à leur errance entre des frontières meurtrières qui ne soient possibles sans une « suspension » de la relation à la mort d’autrui, un déni des gestes de secours, des paroles de réconfort, du partage qu’elle appelle. Notre mémoire du siècle dernier et notre appréhension du siècle à venir sont inséparables du souvenir de leur éclipse qui trace les « limites » de la fraternité. Elle fait du monde dans lequel nous vivons un monde divisé, autant que l’est notre attitude devant la mort des autres, le deuil et la mémoire qui en résultent. C’est cette éclipse que, à la lecture de textes de Freud, de Heidegger, de Sartre, de Levinas, de Patocka, Ricœur et Derrida, cet essai entreprend de comprendre et d’interroger, alors même qu’elle fait l’objet d’une double responsabilité, éthique et politique. Marc Crépon est directeur de recherches au CNRS (Archives Husserl).
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