Quoi de commun entre un photographe
qui essaye de capturer des fantômes,
un expérimentateur qui tente
d'enregistrer ses pensées en disposant
une plaque sensible sur son front,
un opérateur de fête foraine,
un prestidigitateur en chambre noire,
de joyeux amateurs et quelques
chasseurs de reflets ? Rien, si ce n'est
leur appartenance à cette vaste
catégorie photographique encore
insuffisamment étudiée par les historiens
du médium : celle du vernaculaire.
La photographie vernaculaire est le plus
souvent appliquée ou fonctionnelle,
c'est-à-dire utilitaire. La famille est
l'un de ses principaux lieux de
production ou de circulation, elle est
donc aussi domestique. Mais surtout,
elle se situe hors de ce qui a été jugé
le plus digne d'intérêt par les principales
instances de légitimation culturelle.
Elle se développe en périphérie de ce qui
fait référence, compte et pèse dans la
sphère artistique. Elle est l'autre de l'art.
En historien consciencieux, mais non
sans délectation, Clément Chéroux
revient dans cet ouvrage sur quelques-
unes de ces pratiques vernaculaires
oubliées. Elles deviennent autant
d'occasions d'interroger la photographie :
faut-il (ou non) croire aux images,
comment s'aveugler en les regardant,
qu'est-ce qu'un amateur, quel est
l'inconscient photographique du cinéma
de Georges Méliès, les photographes
forains ont-ils le pouvoir de changer
la vie en changeant de décor, quelle était
la véritable activité d'Eugène Atget ?
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