L'art des avant-gardes historiques ne réside pas tout entier dans les oeuvres seules ; les manifestes et autres écrits d'artistes donnent la mesure - ou la démesure - de leurs projets. Mais il faut aussi considérer la portée de la monstration des oeuvres, l'effet de l'exposition en acte.
Ce livre prend le pari de penser les oeuvres à même leurs présentations inaugurales pour comprendre la dimension publique et active de l'art moderne - et de l'avant-garde russe en particulier. Il étudie pour la première fois de manière systématique un ensemble d'expositions de groupe de 1900 à 1916, organisées, imaginées et expérimentées par Sergueï Diaghilev, Mikhaïl Larionov, Kazimir Malevitch ou Vladimir Tatline, dans lesquelles l'exposition prend part aux oeuvres, et inversement. L'examen très concret des conditions de présentation physiques (organisation spatiale, effets d'accrochage), temporelles (durée, précarité, récurrence) et publiques (usage de la photographie, rapport aux médias de masse, au commerce de l'art) permet d'approcher de près les utopies qui sont au coeur de l'art d'avant-garde : agir sur l'expérience sensorielle et temporelle des spectateurs, faire de l'espace public un paramètre et un prolongement de l'oeuvre. À ces utopies, l'exposition offre une institution précaire.
La traduction de textes-source en fin de volume rend accessible aux lecteurs francophones un aperçu des débats que l'exposition suscitait dans la Russie prérévolutionnaire.
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