Ceux qui ont aimé les précédents livres de Pascal Boulanger seront surpris par le changement de ton et le régime très différent de l’écriture d’Un ciel ouvert en toute saison. En effet, ce texte s’adresse à ses deux filles adolescentes, et le ton est celui d’un legs difficile à transmettre, celui d’un ciel désencombré des sirènes fallacieuses qui les menacent. La prose se fait ici prudente, se sachant épiée par des êtres encore fragiles face à l’inconnu et à l’incertitude quant à l’avenir. La beauté de ce texte vient de la fragilité de sa communication avec cette jeunesse plongée dans un monde où tout va à vau-l’eau et où tout sentiment est suspecté d’irrationalité :
L’amour que j’ai pour vous, je voudrais qu’il ne soit pas simplement un sentiment, mais aussi une puissance capable de triompher de la peur.
Admirable et émouvante prière d’un père et d’un poète qui se fait proche de sa propre jeunesse héritière du pire, mais aussi de Rimbaud qui lui apprit à saluer la beauté, en dépit de ce qui enlaidit, massacre et humilie l’élan de nos facultés. Quelle belle injonction au dégagement rêvé prôné par le poète de Charleville dans Génie, que cet incipit de Un ciel ouvert en toute saison :
Quand vous serez tout simplement là, lancées dans notre monde, dressées sur notre planète rocheuse ; prenez soin de vos âmes, suivez le meilleur du présent, oubliez le temps sur le fil au-dessus du néant.
À la lecture de ce livre, le lecteur ne pourra que souhaiter que ce vœu soit entendu et exaucé: puisque vous êtes merveilles – éternellement – dans la prolifération inattendue du simple.
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