Au Siècle des Lumières l'architecture intérieure, qui tient
un rôle primordial dans la quête du bonheur, est soumise
au nouvel impératif d'une sensibilité que l'on ose revendiquer.
«Renouveler perpétuellement les sensations, (...) faire "frémir
l'âme", telle est désormais l'ambition de tout un chacun.»
Aux XVIIIe et XIXe siècles, quelques architectes et théoriciens, en
butte à la suprématie du modèle antique, invoquent de nouvelles
sources d'inspiration pour obtenir la variété à laquelle aspirent
les riches commanditaires dans le décor intérieur de leurs demeures.
Le «goût exotique», qui désigne le goût des formes d'art
et des moeurs des peuples lointains - autrement dit des cultures
non-occidentales - apparaît à même de stimuler l'imagination
des créateurs de décors et de leurs spectateurs. Les salons chinois,
les boudoirs «à la turque» ou les chambres tendues de «perse»
font leur apparition. Comble de la variété, réponse ultime
à cette recherche perpétuelle de plaisir et de dépaysement,
on rencontre parfois, au sein d'un seul et même appartement,
une succession de décors qui transportent le propriétaire
des lieux, sans sortir de chez lui, dans des univers différents.
De l'Angleterre à la Suède, du Portugal à la Russie, certains de
ces décors exotiques, parfois extravagants, sont parvenus jusqu'à
nous et continuent d'exercer leur fascinant pouvoir dépaysant
sur les visiteurs contemporains.
Nostalgie des origines, d'un monde meilleur fantasmé, ou volonté
d'évasion, de fuite hors du temps et de l'espace, ils nous expliquent
comment ces aspirations ont pris corps au sein de la sphère
privée ; qui étaient ces hommes, princes érudits, artistes
ou poètes fortunés, ayant présidé à la création de ces lieux
exotiques qui, aujourd'hui encore, nous transportent ailleurs.
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