« Ce livre décrit un monde privé de transcendance : le seul extrême est celui du Mal. C'est l'enfer ; dont aucune description n'atteint l'horreur C'est notre monde. »
Il rassemble d'abord ce que la vie de l'auteur a pu recueillir de plus sordide : « des petits faits vrais d'enfer, qui laissent entrevoir l'esprit du temps. Mais celui des victimes, des éclopés de la vie - un esprit hors histoire, car il est précisément la négation de toute histoire. » Cette description assez crue permet de bien situer celui qui écrit : Francis Gandon, né à Annemasse (Haute-Savoie) en 1947, professeur de linguistique marqué par Georges Bataille, et qui a enseigné dans plusieurs universités d'Afrique pendant vingt-cinq ans, puis de France, n'est ni un insensible pathologique ni un exalté furieux, ainsi qu'on imagine les fanatiques. Dès lors nous voilà disposés à écouter la suite de son propos : car à ce chaos, l'auteur oppose - ou croit pouvoir opposer contre toute pensée dominante - l'Armée secrète, la Résistance Algérie française, la seule, selon lui, « à avoir gardé parole, à être restée fidèle à une certaine vision historique abandonnée par tous » et pour laquelle elle est vouée aux gémonies. L'auteur n'a jamais été expulsé d'Algérie ni d'ailleurs, il décrit car il a étudié ce « tournant malin de l'Histoire », en 1961 -1962, où une capitulation politique totale succède à une victoire militaire, là où précisément une résistance était possible et « la résurrection de l'incomparable civilisation méditerranéenne authentique, assoupie depuis plus d'un millénaire - rendue hémiplégique par un islam usurpateur » D'où une critique acerbe de « M. de Gaulle », et un sévère avertissement envers la France et Israël. Comment faut-il appeler cela ? la fatalité, le ressentiment, la nostalgie ? Non, une parabole, car cette fidélité devint le cauchemar d'une Armée secrète qui, elle- même privée de transcendance, ne pouvait que perdre, être expulsée de l'histoire, compromettre tout combat futur « où quelque chose comme l'Occident se lèverait ». Enfin, l'auteur évoque quelques figures féminines « d'après la fin », parfois nobles, souvent mièvres ou sordides. L'idée qui s'en dégage est que, dans ces tristes tropiques dont Dieu semble s'être absenté, la Femme reste quand même la seule à faire front, à pouvoir rédimer cette époque ou ce qu'elle n'a pas voulu vaincre : « une ombre de Transcendance.Transcendance quand même. » Ainsi le caractère inaudible et brutal de ce livre est adouci, si l'on ose dire, par l'extrême sensibilité de son auteur ; le ravage même de la douleur causée par une immense déception de nature incertaine, jamais guérie. Seule leçon pour l'Histoire : certains peuples veulent vivre : Israël, le Liban. D'autres semblent avoir renoncé à la vie : la France. L'Arménie.
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