De la cave qui renferme les réserves au grenier où s'amoncellent les souvenirs, une demeure garde l'empreinte de ceux qui l'ont occupée, de leur intimité comme de leur rapport au monde. Certaines maisons sont même chargées d'une telle énergie qu'auprès d'elles, les compteurs s'affolent. À Royan, la villa Aigue-Marine est de cette « trempe ». Par un caprice du destin, cette demeure imposante du boulevard Garnier s'est trouvée au carrefour des grands mouvements économiques, sociaux, artistiques, de la seconde moitié du XIXe siècle et de l'entre-deux-guerres. Elle a été témoin de la naissance et du développement d'une station touristique, incarne l'honorabilité fantasque de l'architecture balnéaire et son devenir, parfois sur le fil. Elle s'est trouvée sur la trajectoire de grands capitaines d'industrie et d'artistes inspirés, cadre de leur vie brillante mais aussi de leurs menues préoccupations. Elle a traversé la guerre sans trop de dommages, contrairement à ses soeurs royannaises, et s'accommode aujourd'hui d'une partition entre propriétaires attentifs qui ont oeuvré pour obtenir son inscription aux Monuments historiques. Aigue-Marine pourrait être la petite soeur du Versailles conté par Guitry - même si on la compare plus volontiers à Chambord - chambre d'écho de l'histoire des hommes. Or, Sacha Guitry passa de longs moments dans la villa royannaise, une coïncidence qui semble nous souffler le titre et le procédé narratif de cet ouvrage. Pour raconter l'histoire d'Aigue-Marine, nous laisserons donc la parole à la principale intéressée.
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