Depuis L'Algérie des contes et légendes (2003), de livre en livre, d'album en album (tel déjà le petit Théâtre du Prince tisserand), Nora Aceval ne cesse de nous montrer à quel point la littérature orale est à l'image de cette femme sage, qui sait si bien faire du neuf avec du vieux. Ce conte aurait ma préférence, tant ces paroles parlent à chacune, à chacun, aux divers âges de la vie. Il n'est que de feuilleter, de glaner, de voir ici une belle-mère de prime abord aimante, là une épouse déterminée à améliorer son sort ou une autre, prête à garder le silence pour y mieux parvenir le moment venu : partout la patience est mise à l'oeuvre du temps.
(...) Bien loin du fracas médiatique, la parole conteuse allie ici la sobriété et l'élégance, la vivacité du dialogue et la rythmicité de la pensée. Sans parti pris idéologique, ni dogmatisme, Nora Aceval, par la magie de son style, nous ouvre un océan de formules sapientiales (proverbes, hadiths, sourates du Coran), certaines en traduction, avec des références précises, comme précieuses balises. Laissons se dérouler ce Tapis chatoyant où s'amuser de tel ou tel personnage, de telle ou telle variante, de tel ou tel motif (par exemple ce gargotier cannibale ici, que l'on pourrait trouver ailleurs fabricant de savon) : un lieu de ressourcement où respirer en toute confiance et liberté.
Nadine Decourt
anthropologue et comparatiste spécialiste de littérature orale
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