Roman volé est le récit d'un fait divers. C'est aussi une réflexion sur la possession, la dépossession, et la soustraction générale qui clôt toute vie. Une rupture du cours des choses produit chez le narrateur de longs échos : un vol. Quoi de plus banal, pourtant, qu'un vol ? A l'arraché, à la tire, à la roulotte, un casse, un saucissonnage : le vocabulaire est riche. Que nous vole-t-on, à ma femme et à moi, ce soir d'été ? Argent, colliers, bagues, passeports, clés de maison et de voiture, différents joujoux bancaires - panique ! Sans ses grigris, le roitelet d'Occident est nu. Mais pourquoi, dans l'aérogare en train de glisser à la nuit, cet excès de désarroi ? Parce que l'on a aussi volé à l'écrivain son manuscrit en cours d'achèvement. Pas de double ? Pas de photocopie, de «mémoire», de «disquette» ? Non, rien. Il n'est plus personne. Aussi désarmé et gueux que le clochard endormi sous ses emballages...
Quel jeu le volé doit-il jouer ? Dramatiser ou minimiser ? Démangeaisons sécuritaires ou désinvolture ? On lui a volé ses rêves. Il craint la récidive, le piège, le martyre, le ridicule. Il craint, si jamais on le retrouve, de devoir relire son manuscrit «d'un œil neuf», c'est-à-dire lavé par le vol, et de découvrir qu'il ne vaut pas tripette. Du moins le «travail de deuil», comme dit le langage élégant, a-t-il commencé d'effacer la magie, la crédulité, l'illusion littéraires ? On ne va quand même pas faire la guerre pour Dantzig, ni un scandale pour un roman contestable ? Nos textes nous sont donnés, dites-vous. Ils nous sont aussi volés : y voyez-vous une différence ? Création, imaginaire, personnages, etc. : sourdine ! sourdine !...
F. N.
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