Que Barthes soit un moraliste relève d’une évidence. En suivant le continu moral du discontinu formel, en dessinant un cheminement dans la diversité de l’œuvre, ce livre se propose de donner corps à une impression première. « Éthique », terme moins compromis, en reste au plan des principes sans ouvrir forcément sur des préoccupations concrètes. « Morale » permet de placer au premier plan un « je », sujet complexe et fluctuant, qui se demande à partir de sa propre expérience d’homme, de lecteur et d’écrivain « comment vivre ensemble » (titre du premier cours de Barthes au Collège de France). La question très pratique du « que faire ? » engage la responsabilité de l’individu à l’égard de l’autre au sein d’un espace relationnel dominé par le langage. En proposant à la fois une écriture de la morale, une morale de l’écriture et une morale par l’écriture, Barthes considère le rapport entre auteur et lecteur comme la métaphore et le champ d’expérimentation de toutes les relations humaines possibles. Règles de vie et règles d’écriture entrent dans une relation fondamentale qui ouvre sur une pensée de la rhétorique et du contrat. L’engagement politique ou esthétique, la « subversion subtile », le « non-vouloir-saisir » sont autant de formes que prend le rapport problématique du sujet et de l’autre. Tantôt menace, tantôt accomplissement, l’autre du lecteur arrache le sujet à l’égotisme et offre une solution acceptable au tragique de l’écriture comme au tragique de la vie.
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