« Rien n'est plus drôle que le malheur »
Du comique et de la douleur dans les écritures dramatiques contemporaines
« Rien n'est plus drôle que le malheur, je te l'accorde. Mais - »
Cette réplique de Nell à Nagg, dans Fin de partie de Beckett (1957), peut être considérée comme programmatique de tout un pan du théâtre comique contemporain. Situé entre rire de la douleur, rire avec douleur, rire malgré la douleur et douleur de rire, ce théâtre ne craint plus de faire commerce avec la mélancolie, de s'aventurer sur les territoires les plus violents de l'histoire du XXe siècle, d'entretenir des liens étroits avec les désastres intimes et collectifs, d'explorer tout le lamentable de la vie humaine, de réinventer de drôles de tragédie. Rendant compte d'une mutation de la sensibilité comique occidentale qui s'est engagée depuis le XIXe siècle, il nous propose, envers et contre tout, un rire quand même : paradoxal, insolent, provocateur, inattendu, ambigu, anxiogène et libérateur tout à la fois.
À travers un ensemble de pièces écrites, pour la plupart d'entre elles, au cours des vingt dernières années, dans l'aire européenne - avec quelques ouvertures du côté de l'Algérie et d'Israël -, cet ouvrage rend compte de la diversité des dramaturgies du comique et de la douleur. De George Tabori à Noëlle Renaude ou Patrick Kermann, d'Eugène Durif ou Daniel Lemahieu à Biljana Srbljanovi(...) en passant par Hanokh Levin, Michel Vinaver ou Werner Schwab, les théâtres ici explorés conjuguent pertinence mimétique et impertinence ludique : le comique s'y présente comme un outil de représentation du monde et d'examen de l'histoire, mais il témoigne également d'une quête de résistance et d'une roborative obstination à vivre.
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