Au XIIIe siècle, les pouvoirs médiévaux s’assimilent un ensemble de techniques rhétoriques élaborées au Moyen Âge central sous le nom d’ars dictaminis La cour sicilienne de l’empereur Frédéric II est, sous l’impulsion de Pierre de la Vigne, un laboratoire privilégié dans le processus de perfectionnement de cette prose politique rythmée. Alors que s’effondre la dynastie souabe, les héritiers de sa chancellerie transmettent à la postérité les textes les plus représentatifs de cette rhétorique impériale en créant une collection de dictamina : les Lettres de Pierre de la Vigne, auquel ce style emphatique et voilé d’obscurités métaphoriques sera désormais associé. Ce livre étudie une étape décisive de la formation du langage politique européen à partir de l’histoire des Lettres, envisagée dans ses différents aspects, de la création mystérieuse de la collection jusqu’à sa transformation en objet historique, en passant par l’analyse du milieu, de l’idéologie et des techniques rhétoriques des créateurs de ses textes, de leur impact et de leur interprétation contradictoire dans la société du XIIIe siècle. Il montre les procédures mises en œuvre par les notaires ultérieurs pour exploiter ce « miroir rhétorique » et son poids dans la transformation générale du langage étatique européen au cours d’un long XIVe siècle (1270-1420), de l’Angleterre à la Bohême, de la France à l’Italie. En explorant ce continent du dictamen politique ultérieurement recouvert par la vague humaniste, on tente ainsi de progresser, sur la piste de Kantorowicz, dans la reconstitution des liens mystérieux unissant idéologie linguistique, droit et construction étatique à l’automne du Moyen Âge.
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