 
                        Ce classique publié au Pérou en 1968, après 5 éditions et sa traduction en anglais, apparaît
 enfin en français. Cet ouvrage se lit aujourd'hui comme s'il avait été écrit hier, avec la
 fraîcheur d'une voix nouvelle. Non seulement ce livre a inauguré les études amazoniennes
 au Pérou et dans le reste de l'Amérique latine au moment de sa publication, mais il a aussi
 devancé de loin les livres d'Eric Wolf Europe and the People without History (1982) et de
 Johannes Fabian Time and the Other (1983) en présentant l'extraordinaire histoire de la
 rébellion du peuple Campa Asháninka contre l'oppression coloniale espagnole. Par leur
 mouvement de résistance, les Asháninka ont pu fermer leur territoire aux colonisateurs durant
 un siècle et demi. Le portrait et l'histoire de leur leader Juan Santos Atahualpa sont ancrés à
 jamais et se sont transmis parmi les peuples indigènes au-delà des frontières amazoniennes,
 inspirant des mouvements d'autonomie et de résistance. Varese, anthropologue italo-péruvien
 profondément inspiré par Antonio Gramsci, a créé avec son travail l'Histoire Subalterne des
 années avant que Ranajit Guha lance son groupe d'étude dans le sud de l'Asie durant les
 années 1980. Cependant, contrairement à l'école des Études Subalternes, Varese ne voit pas
 la spiritualité amazonienne de la même façon que la majorité des intellectuels marxistes et
 socialistes - c'est-à-dire comme construction du colonialisme - et reconnaît dans celle-ci les
 ressorts profonds de sa résistance. Cette opposition exprimée en 1968 est notable et le reste
 aujourd'hui. Elle manifeste une grande originalité, une liberté de pensée et une sensibilité
 profonde face à la réalité vécue par les Asháninka.
Ce livre fut le premier en son genre, de façon que quand le gouvernement de gauche de
 Juan Velasco Alvarado prit le pouvoir en 1968 avec la détermination d'améliorer la situation
 des peuples indigènes du Pérou exploités et opprimés, il s'adressa à Varese pour qu'il aidât à
 la création d'une institution focalisant ses efforts sur les besoins les plus urgents des peuples
 indigènes amazoniens. Varese est respecté par les peuples amazoniens du Pérou comme le géniteur
 de la Loi des Communautés Natives de la Forêt qui a permis la délimitation légale des terres
 indigènes ainsi que l'organisation autonome des gouvernements communaux traditionnels dans
 leur lutte contre le vol et l'invasion des terres. Varese a aussi participé à la législation qui autorise
 l'éducation bilingue en espagnol et en langues indigènes pour les étudiants des communautés
 indigènes. Bien que ces lois aient été érodées par tous les gouvernements postérieurs, l'esprit et
 le mouvement social qui les inspirèrent n'ont pas disparu.
Avec le contrecoup soutenu par la CIA qui renversa Juan Velasco Alvarado en 1975,
 Varese et ses collègues ayant travaillé pour le gouvernement Velasco eurent des difficultés
 à trouver du travail au Pérou. Varese fut invité par l'Institut National d'Anthropologie et
 d'Histoire de Mexico, à reprendre ses études parmi les peuples indigènes de Mésoamérique.
 Son implication sociale l'amena à être membre du Jury du IV tribunal des Peuples Bertrand
 Russell (Rotterdam, 1981) et à travailler comme consultant pour le Haut-Commissariat aux
 Réfugiés de l'ONU dans le cas de la guerre génocide des peuples mayas du Guatemala.
 Après quinze ans passés au Mexique, Varese fut nommé Professeur titulaire à la chaire du
 Département des Études Indigènes de l'Université de Californie, Davis, où il a fondé le Centre
 d'Investigation Indigène des Amériques et où il poursuit son activité académique et activiste
 accompagnant les peuples indigènes des Amériques.
 
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