Fakir Éditions a reçu, par la Poste, une trentaine de cahiers, couverts d'une écriture
serrée, rédigés en italien, et dans un charabia imbittable. C'était signé d'un certain
«Antonio Gramsci». Le gars était en prison, on a décidé de le rencontrer, pour lui
rendre ses machins, plutôt que de les balancer à la poubelle.
Du coup, le philosophe communiste nous a éclairés sur ses concepts-clés :
«hégémonie», «guerre de position», «intellectuel organique», etc.
Des outils toujours utiles pour saisir le présent.
Fakir : On a traversé une crise financière, c'est peut-être pas terminé, et des
militants entrevoyaient la fin du capitalisme...
Antonio Gramso : Ah, les prophètes de la facilité.
Fakir : Vous appelez ça comment ?
A.G. : Ça m'indigne quand certains camarades, à l'attitude superficielle,
affirment que la chute du fascisme est imminente, deux ou trois mois, l'hiver
au maximum... Comme si la «misère» débouchait sur la révolution. Mais
la misère, même la faim, ça peut provoquer des soubresauts, sûrement pas
détruire le système capitaliste.
Car l'adversaire est de taille. Il a une longue expérience du pouvoir, il s'appuie
sur une bureaucratie spécialisée, sur de puissants canaux de propagande, sur
des appareils militaires, policiers, judiciaires très bien rôdés, bref, il détient
quasiment tous les «bastions». Croire qu'une secousse suffira à vaincre
pareil ennemi, je vais vous dire : ce n'est pas seulement du délire, c'est une
manifestation d'impuissance, c'est l'espoir placé en un deus ex machina qui
tomberait du ciel.
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