Le nom de la biographie ne doit pas ici induire en erreur. On ne trouvera dans ce livre aucune information touchant la vie publique ou privée de Pierre KLOSSOWSKI. Cet essai n’est ni historique, ni, en aucune façon, documentaire. Sans doute mériterait-il le nom de "fausse étude", appliqué naguère à son propre ouvrage par l’auteur de Nietzsche et le cercle vicieux. Tenter d’analyser, à travers l’œuvre écrite autant que peinte, fictionnelle autant que théorique, ce qu’il désigne comme le "phénomène de la pensée", n’est-ce pas un projet comparable à cette "biographie intellectuelle" par lui consacrée au philosophe allemand ? Son propos était alors de mettre en évidence ce qu’il appelait un "cas singulier". Comment, dans ces conditions, ignorer cette monomanie qu’à son tour il revendique, et dont la figure la plus obsédante est peut-être en ces barres parallèles, concrètement pratiquées dans quelque gymnase parisien, avant d’être racontées et dessinées et finalement fixées en une sorte de sculpture qui fut exposée en 1990 ? Ce que nous donne à contempler cette exemplaire composition, c’est la métamorphose poétique d’un objet d’usage en instrument de torture. Tel geste, d’écriture ou de peinture, engage de profondes distorsions dans le tableau de la biographie et dans la pratique même du langage. Toute lecture de l’œuvre de KLOSSOWSKI requiert une remise en question de l’ensemble du vocabulaire de la philosophie et de la critique littéraire et s’aventure, de ce fait, dans la voie du simulacre et du paradoxe. Aussi le propos implicite de cette fausse biographie était-il en même temps de montrer en celui qui prétendit n’être ni un philosophe, ni un écrivain, ni un artiste, l’initiateur et la justification vivante et agissante d’une certaine modernité esthétique ; de plaider de cette manière en faveur de celle-ci et d’en détailler le concept.
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