Piero della Francesca et La flagellation d'Urbino

Tout le monde connaît Piero della Francesca, un des plus grands artistes de l'histoire de l'art. Et tout le monde connaît au moins de vue sa peinture la plus célèbre : la Flagellation dite d'Urbino, en référence à son lieu de conservation.

La Flagellation n'est pas seulement une des œuvres les plus fameuses de la Renaissance italienne et du quattrocento en particulier. Elle est la Renaissance qu'elle incarne à elle seule, purement et simplement, tant d'un point de vue formel qu'iconographique. L'une des images les plus débattues aussi depuis des siècles par la critique qui tente désespérément de lever le mystère et résoudre l'énigme qu'elle renferme apparemment. Ce livre, fruit d'une recherche acharnée depuis plus de vingt ans sur les chemins de la Grèce et de l'Italie, révèle enfin son sens profond tout en dévoilant pour la première fois de façon probante l'identité des protagonistes de la représentation. Une rencontre diplomatique pour sauver Byzance de la catastrophe imminente qui la guette et une Passion allégorique afin d'exprimer les souffrances de l'Eglise chrétienne d'Orient, c'est le sens littéral qu'elle exprime. Image de propagande subliminale, elle contient également un vœu implicite : laver la réputation du duc d'Urbino tragiquement assassiné et, surtout, faire renaître le grand empire romain à travers la réconciliation œcuménique et culturelle de Rome avec Constantinople enfin réunis, depuis le grand schisme, dans une même croisade pour la civilisation contre le barbare ottoman.

Sol invictus d'Apollon-Constantin, premier empereur romain chrétien et fondateur de Byzance, qui s'assimile au Christ miséricordieux et vainqueur de l'obscurantisme.

Plus que jamais ce tableau, que nous n'hésitons pas à qualifier comme l'image la plus importante du quinzième siècle, et le livre qui l'illumine dans toute sa beauté et sa vérité cachée sont d'actualité pour comprendre l'histoire des relations entre les deux pôles géopolitiques de l'Europe alors que se profile de nouveau à l'horizon de l'Orient la menace impérialiste de ceux qui ont la nostalgie d'un autre temps.



Tout Docteur en histoire de l'art de l'Université catholique de Louvain, Jean-Pierre De Rycke a été conservateur du Musée des Beaux-Arts de Tournai de 2008 à 2018. Après de nombreux voyages en Italie et une expérience de plusieurs années en Grèce - où il a notamment enseigné la peinture du Quattrocento aux universités de Crète et de Thessalie -, il concentre désormais ses recherches sur la célèbre Flagellation d'Urbino dont la beauté fascinante et le sens énigmatique débattu depuis des siècles offrent la synthèse parfaite de sa passion pour la Renaissance italienne et la culture gréco-latine. Cette image majeure - sinon la plus importante - du quinzième siècle offre le miroir complet des enjeux artistiques, culturels et géopolitiques de son temps, plus que jamais d'actualité. Les découvertes essentielles de Jean-Pierre De Rycke, qui ont renforcé la compréhension et la reconstruction historique de l'œuvre, ont déjà fait l'objet de plusieurs publications et conférences, notamment à Florence (Gallerie degli Uffizi) et à New York (The Metropolitan Museum).