Barry Gifford est un auteur connu en France de tous les amateurs de romans noirs. Sa notoriété est plus grande encore depuis que certains de ses héros sont devenus des personnages de cinéma, à l'instar de Sailor, Lula ou Perdita Durango. Ces chroniques de cinéma, pour la plupart écrites pour un magazine de San Francisco, Mystery Scene, sont autant de récits noirs d'une Amérique qu'il connaît bien, et qui est aussi celle de ses propres fictions. A tel point que son écriture glisse parfois sans transition de l'anecdote biographique à la scène de film, à tel point que les copains de son quartier de Chicago, les «affranchis», peuvent à tout instant se transformer en gangsters d'Anthony Mann. Non décidément, le regard de Barry Gifford n'est pas celui d'un critique de cinéma, même s'il avoue d'emblée une dette imaginaire envers les Cahiers du cinéma des années 50 ; c'est davantage celui d'un spectateur intuitif qui repère la quintessence du film noir dans toutes ces histoires que raconte le cinéma. Sous sa plume, c'est toute la violence des villes américaines qui surgit, habitées de méchants inhumains, de héros tentés par le diable et rattrapés in extremis par la morale, de filles vénales, de femmes fatales, de flics corrompus, de rebelles impuissants, de ratés au cœur sensible, incarnés par les figures des plus grands acteurs américains, Humphrey Bogart (Les Passagers de la nuit), Robert Mitchum (Pendez-moi haut et court), James Cagney (Les Anges aux figures sales), Kirk Douglas (Le Champion), Edward G. Robinson (La Rue rouge), Ida Lupino (La Femme aux cigarettes), Barbara Stanwyck (Assurance sur la mort), Gene Tierney (Laura) ... Ce ne sont pas les chefs-d'œuvre que Barry Gifford recherche au fil de ses articles, mais les films qui montrent les multiples épisodes de l'affrontement entre le bien et le mal, dont une force supérieure, un jour, a décidé que le lieu serait l'Amérique, et Hollywood le témoin.
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