Qui ne connaît pas les contes de Perrault ? C'est comme les fables de la Fontaine, un patrimoine quasi originel.
Mais ce qu'on connaît, c'est les histoires. Comme infiniment reprises, déclinées, racontées. Quand ce n'est pas remplacées par les adaptations filmiques, parfois chargées de tout le merveilleux de l'enfance.
Mais, comme dans la Fontaine aussi, c'est ce creuset de la langue française au 17ème: comme Racine, comme Bossuet, comme Sévigné ou un peu plus tard Saint-Simon. La langue s'aventure dans des terrains neufs, s'y ébroue, et ne peut y tenir que par ce parfait équilibre, cette respiration. Elle découvre qu'ici, dans ce terrain neuf, elle entre en possession de son bien – mais elle ne reconnaît plus sa propre peau, sa propre forme.
Perrault a écrit en prose (on rassemblera bientôt ici les contes en prose), et en vers. Un conte de facture peut-être plus classique, où se forge l'outil: Griselidis. Et Peau d'Âne.
Dans Peau d'Âne, on retrouve les figures sans lesquelles il n'y a pas le conte: la gueuse à la fin épouse le prince.
Mais ceux qui lisent Saint-Simon savent bien la dimension et le déséquilibre que prend, au temps de Louis XIV, le mariage forcé. Les Mémoires du "petit duc" sont remplis de ces récits pathétiques, vies sacrfiées.
Perrault attaque ici. Non seulement on va marier la fille du Roi de force, mais c'est son père qui veut l'épouser. Débordement de l'ordre: l'inceste s'ajoute à l'autorité imposée. Il n'y a pas de recours, que se détruire: Peau d'Âne, en gagnant ce nom, construit sa destruction.
C'est ce qui rend si beau le vers, sa coupe, sa syncope. Depuis combien de temps n'avez-vous pas lu Peau d'Âne ?
Et si vous préférez écouter, version audio (26') à télécharger...
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