Dans sa mégalomanie criminelle, Nicolae Ceausescu,
pour aider à «la transformation révolutionnaire de
l'agriculture», entreprit de détruire et de plonger dans «un
silence sépulcral» les villages roumains aux ancestrales
maisons de bois, sculptées comme des broderies. On
construisit à la place de hideux HLM sans confort, parfois
sans eau courante, pour reloger ces paysans qui vivaient
depuis des siècles en étroite symbiose avec leur terre. C'est
pour que ne périsse pas le souvenir de ces villages que Marin
Sorescu écrivit La Lilieci (1988), un très long poème en
forme de chronique. Jean-Louis Courriol en a choisi et
traduit les passages les plus savoureux ou les plus émouvants
ou encore ceux que le régime avait censurés. Marin Sorescu
prête ici sa voix et son humour plein de tendresse à ces
paysans avec lesquels il a été élevé. Il fait sien leur parler
séculaire pour l'arracher à l'oubli. Sauvant leur langue, il
sauve leur mémoire, leurs rites, leurs superstitions, leur
modeste fierté et leur malice pince-sans-rire.
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