Aussitôt après la prise de pouvoir par Hitler, en janvier 1933, la majeure partie des intellectuels allemands (scientifiques, philosophes, écrivains, artistes) quitte le pays. Les raisons de cet exil, essentiellement vers d'autres pays d'Europe jusqu'en 1939, sont le plus souvent non pas raciales, mais politiques. Pour certains, il y va de la vie ou de la mort. L'Allemagne n'en continue pas moins à publier des livres, à jouer des pièces, à donner des concerts, des cours à l'Université etc... Parmi les intellectuels restés au pays figurent des noms célèbres : le poète Gottfried Benn, le philosophe Martin Heidegger ou le Prix Nobel de littérature Gerhart Hauptmann. Qu'est-ce qui pousse ces intellectuels à se mettre au service des nazis : une conviction politique, le simple l'opportunisme ? Les exilés observent avec une extrême attention les faits et gestes de leurs collègues en Allemagne afin de tracer une frontière symbolique entre les « véritables intellectuels » et les « traîtres ». À relever d'un discours d'une extrême sévérité, plus tard adoucie il est vrai par une plus juste compréhension, la condamnation des « renégats » pose la question des modalités de la lutte contre un discours totalitaire : est-il possible de s'opposer à un langage perverti, sans tomber dans les travers mêmes que l'on dénonce ? La question se double d'une autre : peut-on, de l'extérieur et sur des critères uniquement politiques, juger de qui est un traître et qui est un opposant ? Le livre éclaire ici le problème de la culpabilité dans un régime totalitaire.
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