« Paris sera toujours Paris » chantait Maurice Chevalier en 1939. Ville éternelle, ville lumière, Pantruche, Paname...
Pourtant nombre d’auteurs ont rêvé d’autres Paris, de Paris du futur. Nous proposons quelques-unes de ces visions datant de 1851 jusqu’à 1906 dans ce volume. Émile Souvestre propose en 1843 une anticipation qui n’est guère réjouissante dans Le Monde tel qu’il sera où les banquiers ont pris le pouvoir, les enfants sont allaités par des nourrices à vapeur, la presse est sous le monopole d’un seul titre et les citoyens sans cesse contrôlés. Vingt ans plus tard, Jules soumet le manuscrit de Paris au XXe siècle (écrit vers 1863) à son éditeur Hetzel qui le refuse. D’autres textes sont publiés comme ceux de Pierre Véron (En 1900, 1878), Émile Calvet (Dans mille ans, 1883), ou d’Albert Robida (Le Vingtième siècle en 1882 ou La Vie électrique en 1892). Entre 1851 et 1906 plusieurs auteurs imaginent des Paris futurs. Ces visions sont très variées et naviguent entre utopie sociale, satire et humour. Chaque texte a ses caractéristiques propres et parfois surprend par sa modernité. Théophile Gautier donne deux articles au journal Le Pays en décembre 1851 sous le titre « Paris futur » qui sont recueillis dans Caprices et Zig-Zags en 1852. Raillant le nombrilisme parisien, le « parisianisme », et son orgueil déplacé, il compare le pauvre Paris du XIXe siècle aux splendeurs des villes antiques avant d’imaginer une remise à plat (au sens propre). Deux ans plus tard, Joseph Méry répond à Théophile Gautier avec un « Paris futur » satirique que Françoise Sylvos caractérise ainsi : « Il y brocarde tous les travers de Paris qui font partie des lieux communs du pré-urbanisme utopique. Sur le mode de Boileau ou dans la tradition de Montesquieu, il critique les embarras de Paris et propose d’enjamber les avenues encombrées à l’aide d’arches ressemblant à des galeries couvertes. Ces dernières permettent aux piétons de vivre, de consommer sans avoir à traverser les grandes artères de la capitale. » Que d’eau, que d’eau, pourrait-on ajouter mais pour le comprendre, il faut lire ce texte. » Le « Paris Futur » de Victor Fournel est beaucoup plus sérieux. Historien de Paris, il imagine ce que pourrait être le Paris de l’avenir selon un « modèle exacerbé de l’urbanisme haussmannien ». En 1869, Tony Moilin, futur communard, rêve d’un Paris utopique dans Paris en l’an 2000. Comme il l’indique dans son avertissement : « Le Paris dont il est question dans cet ouvrage ne ressemble guère, je l’avoue, au Paris actuel. À tous les incrédules qui trouveraient mes réformes trop radicales et impossibles à réaliser, je ne répondrai qu’un seul mot : c’est que d’ici à l’an 2000 il s’écoulera 131 années, et que, pendant ce long laps de temps, il pourra survenir plus d’une révolution et se faire bien des changements. » Si l’extrait proposé ici ne concerne que la « transformation de Paris », l’utopie de Tony Moilin balaie l’ensemble des réformes dont il rêve : organisation du travail, société, instruction, gouvernement, religion et mœurs. Il ne survit pas à la Semaine sanglante et est fusillé le 28 mai 1871. Le texte d’Arsène Houssaye nous projette en « L’An trois mille sept cent quatre-vingt-neuf » dans un Paris devenu une capitale de l’univers pleine de poésie. Finissons sur la note humoristique que nous offre Eugène Fourrier imaginant des archéologues du futur décryptant une bien mystérieuse inscription communément gravée sur les murs de Paris.
— Philippe Éthuin
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