"D'un point de vue purement comptable, la chose n'était donc
pas équilibrée : se lever une demi-heure plus tôt cinq fois par
semaine, entre 10 et 12 marks mensuels de frais supplémentaires
pour une marchandise boulangère et pâtissière superflue, l'intérêt
dévorant de Mme Lörke pour ma double idylle au bureau,
la reconnaissance de Mlle Weigel et les allusions piquantes des
collègues, enfin l'effort qu'il fallait tout de même fournir pour que
le commerce avec Mme Schwint s'en tienne au seul plaisir de croquer
dans ses croustillants brötchen... Tout ça pour deux bouts de
pain, ce n'était, en termes comptables, pas tout à fait autorisé.
Sauf que le comptable ne comptait plus lorsqu'il croquait dans
les schrippen de Schwint. Ils étaient tels, justement, que tout
calcul était interdit. Ils étaient la vie."
Lorsque le narrateur de ce court récit tombe sous le charme
des irrésistibles pains spéciaux fabriqués par Schwint, le boulanger
de la rue dans laquelle il vient d'emménager, s'enclenche un troc
sans fin. Car Schwint lui réclame bientôt, en contrepartie,
un certain roman érotique chinois, parfaitement superflu mais qui
lui est tout aussi indispensable. Et voilà le piège de la gourmandise
qui se referme. Mais que ne ferait-on pas pour se procurer
un plaisir rare ?
Une fable drôle et raffinée... à déguster sans modération.
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