Comme il y a des mutilés de guerre, il y a des oubliés de guerre. Soldats des anciennes
colonies embarqués pour des guerres qui n'étaient pas les leurs, et que la décolonisation
a laissé sur le carreau avec quelques dizaines d'euros pour toute pension.
Parmi ceux-là, ces anciens combattants marocains de l'armée française qu'Olivier
Pasquiers et Michel Séonnet ont rencontré en France dans des foyers Sonacotra, et
qu'ils ont accompagnés au Maroc pour l'un de leurs éphémères retours au pays.
Si ces hommes très âgés sont en France c'est pour tenter de compléter leur maigre
pension militaire avec le revenu du minimum vieillesse auquel leur donne droit leur
carte de combattant : à condition qu'ils résident en France au moins huit mois par an.
La solitude du foyer. Les allers-retours épuisants en autocar. La douleur de voir la
famille dans des difficultés. Ces retraités migrants vivent dans l'angoisse de mourir de
ce côté-ci de la mer et personne pour payer le retour de leur corps au pays.
Pourtant c'est à leur dignité que s'adressent les Chants qui constituent la partie centrale
de ce livre. Comme on conte à la veillée les récits des anciens, ils disent la saga
militaire et humaine de ces hommes qui, de campagne de France en campagne
d'Indochine, de Berlin à Haiphong, jusqu'aux djebbels algériens, ont offert le meilleur de
leur vie. Et si peu en retour.
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