« Alors, dis-je un jour à mon grand-père, accablée par son constat amer sur l'état du monde, il y a des riches et des pauvres ? » Je me souviens d'avoir pensé - et non pas dit, premier silence conscient, quoique gâché d'illusion : « On a attendu jusqu'à moi, une petite fille, on a supporté ? Y avait qu'à partager pourtant. Quand je serai grande, je changerai ça ! » Et... J'ai eu toute ma vie pour constater mon échec. Déception silencieuse, je la crois fondatrice, alimentant un des ruisseaux d'un sentiment-fleuve : celui de désir et d'impuissance. Il y eut auparavant le lyrisme paternel - mais il était au loin, du temps de ma vie occitane -, les chants dont il m'avait entourée : une source du vaste fleuve que l'écriture voudrait remonter (kayak immobile). Il en est d'autres. L'intranquillité d'être au monde, un manque insaisissable ; le plaisir d'être au monde, une abondance insaisissable.
En effet, c'est au temps de « l'autre langue » qu'une telle dialectique du vivant s'est instaurée. L'occitan me fut pays imaginaire, désir comblé impossible à combler et langue sous la langue. Comment naît le désir d'écrire, la lente maturation, le combat avec soi-même, l'exigence prégnante et le « loyal adversaire » dont parle Char ? Tissés à l'histoire personnelle, exil et désir se mêlent et mènent à, à quoi, éventuellement à l'écriture.
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