"Comme le désir sexuel, la mémoire ne s'arrête jamais", écrit Annie Ernaux dans Les années. "Elle apparie les morts aux vivants, les êtres réels aux imaginaires, le rêve à l'histoire." L'oblique est un regard que l'on jette derrière soi, à un moment donné, pour pouvoir repartir. La mémoire est notre béquille. S'asseoir à côté de quelqu'un qui raconte en un souffle les trajectoires familiales, et c'est tout un flux d'images et de paroles qui se déploie, non pas à la vitesse de la lumière mais à la vitesse de la mémoire. Cette voix en nous-mêmes prête à conter la légende familiale et les drames du passé, l'écho des souvenirs, le staccato du flux photographique, nous la portons car "il reste des séquelles des autres corps" en nous.
Oblique est l'un de ces livres qui savent à la fois fragmenter la mémoire comme les petits morceaux aimantés de Ligeti et lui donner l'élan du souffle unique, la tension tenue d'une injonction mythologique : ne te retourne pas.
« Je n’ai pas raconté d’histoires. La vie
est un fouillis qui tourne en tenant sur
son cœur un morceau de la valse de
Sibelius, parfaitement triste et
parfaitement inimitable. »
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