«Il est un lieu, non loin de chez moi, que j'aime infiniment traverser à
différentes heures de l'après-midi. Il se situe à la rencontre d'une petite
rue, dont j'ignore le nom, et de la rue des Goncourt au bout de laquelle se
trouve une poste. Entre les deux, quelque chose qui n'est même pas une
place, et qui s'adosse à l'église Saint-Maur noircie et triste.
En passant par là, je retrouve ce que j'ai tant goûté dans certains paysages
de banlieue : le sentiment d'une persistance mystérieuse, cachée
dans la nullité de l'endroit. Si le néant pouvait s'incarner, il aurait ce
visage de pierres grises, de poussière et de silence. Cela me trouble surtout
à la tombée du jour, lorsque s'allument les réverbères, et que tout ce
petit théâtre s'enfonce dans l'ombre. Ce que j'éprouve alors, je ne puis
l'appeler autrement que l'amour.»
Dans ce nouveau volume de son journal, Noël Herpe poursuit son entreprise
autobiographique, fidèle au parti pris de s'écrire au quotidien,
comme s'il cherchait à déchiffrer les rythmes souterrains de sa vie, ou les
fils d'un récit invisible.
L'inertie des années 1990 et la mort du père, que décrivait Journal en
ruines, ne représentent plus ici qu'un souvenir. Au milieu des années
2010, un nouveau rapport au monde se dessine, que cristallise la figure
d'Édouard, un garçon insaisissable, tandis que l'imprévu, l'étrange,
l'autre entrent en scène.
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