Dans les décennies 1880-1900, au coeur d'un paysage bouleversé par le développement industriel, un pessimisme qualifié de « fin-de-siècle », marqué par la défaite de 1870, puis par les scandales financiers et politiques, domine les esprits. À cette même époque, la psychiatrie - avec Charcot, Janet, Breuer et quelques autres - étudie l'hystérie et la neurasthénie, relayée par de nombreux ouvrages de vulgarisation, par la littérature et par la grande presse qui offrent ces dérèglements en miroir à un public avide de s'y reconnaître. Se déclarer « névrosé » n'est alors nullement péjoratif mais, bien au contraire, à la mode. N'est-ce pas se singulariser que d'affirmer son extrême sensibilité, sa délicatesse de constitution et sa propension à rechercher les plaisirs raffinés ?
Comme on porte un diagnostic, Louis Crocq brosse le tableau de cette mentalité crépusculaire à travers une galerie de portraits pittoresques où se croisent à la fois écrivains décadents - Pierre Louÿs, J. K. Huysmans... -, snobs et aristocrates gagnés par la mélancolie - Robert de Montesquiou, Boni de Castellane... -, demi-mondaines volontiers apôtres du saphisme - Liane de Pougy, Natalie Bamey... -, et artistes à la fragilité nerveuse - Cécile Sorel, Sarah Bemhardt... Ainsi se trouve restituée, au seuil de la Belle Époque, toute une société qui, à bien des égards, n'est pas sans éveiller quelques échos dans la nôtre.
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