Accréditant le propos de Barthes selon lequel «la modernité commence avec la recherche d’une littérature impossible», l’œuvre de Mallarmé se présente comme création ex nihilo: elle advient à partir d’un manque, d’un vide, d’un «rien» que le poète désigne comme «la pièce principale» du «mécanisme littéraire». L’origine de la voix poétique se profile en effet comme un néant sonore, un «creux néant musicien» où le vide devient un espace de résonance pour l’esthétique de la virtualité qui, des Poésies à l’élaboration du «Livre», s’y déploie subtilement. Aussi, cet essai interroge-t-il les orientations suivies par Mallarmé pour nourrir les questions aiguës que l’œuvre nous pose encore aujourd’hui: comment l’impossibilité peut-elle être fondatrice de la création littéraire? Ou plutôt: comment, aussi chargée qu’elle soit de réminiscences, l’écriture poétique peut-elle naître du fait même de son impossibilité, voire de la reconnaissance lucide de son impossibilité, si ce n’est de la déclaration et de la visée même de son impossibilité? Avec la traversée mallarméenne des paradoxes et des apories, Eric Benoit éclaire les points nodaux d’une esthétique qui réclame la participation du lecteur. La réflexion proposée prend d’abord corps dans le recueil des Poésies, puis aborde les poèmes en prose, la Dernière Mode, les feuillets du Tombeau d’Anatole, avant les projets du «Livre» rêvé lui-même comme à la fois nécessaire et impossible, horizon inaccessible d’une aventure littéraire dont l’enjeu aura pourtant été le salut de l’homme et du monde.
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