Morphoses
Une cosmogonie se définit essentiellement comme un récit présentant la manière dont s'engendre un monde. Pourrait-il exister une civilisation qui ne possède pas sa cosmogonie ? Sûrement non. Et l'univers de Delphine Vaute n'échappe pas à la règle : il y a effectivement ici éclosion d'un monde et cosmogonie. On y trouve flores, faunes, êtres humains et monstrueux, métamorphoses, créations organiques, forces naturelles en actes et productrices de formes. À l'image du récit cosmogonique traditionnel que l'on découvre chapitre après chapitre, celui de Delphine Vaute se laisse deviner au fil de ses dessins, comme le récit graphique d'un univers qui ne pourrait s'accomplir qu'avec l'accent du mythe. Comme il existe un cheval ailé (Pégase), un animal lion par devant, serpent par derrière, et chèvre au milieu (la Chimère), il existe dans l'univers de Delphine Vaute des créatures mythologiques telles que le faon aux oreilles d'ailes de papillon ou la petite fille à tête de chien, etc. Malgré la douceur et la délicatesse du trait et des couleurs, cet univers n'en reste pas moins comme travaillé de l'intérieur par une sorte de violence, comme si la nature devait sa puissance et son accomplissement à des compositions dépassant (et mêlant) les genres et les espèces, comme autant de transgressions vitales et nécessaires. Telle est sans doute la loi profonde de cette cosmogonie des plus intimes.
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