Dans le Paris des années 1880, le monologue a une place de choix. Dans les soirées privées comme dans les cafés-concerts, autour du journal Le Chat Noir et de son théâtre d'ombres, artistes, poètes et noctambules le portent à la hauteur d'un art véritable.
Coquelin-Cadet, de la Comédie-Française, se fait une spécialité du monologue, « enfant bizarrement conformé, dont le premier bégaiement a été « Le Hareng saur ». Charles Cros est son auteur attitré.
Plus d'un siècle plus tard, la qualité de ces textes apparaît avec évidence. Cros, le savant naïf, refait le monde avec des mots. Enchanteur et curieux de tout, poète et inventeur, il applique aux petites choses de la vie les grandes lois de l'univers. Il en sort un comique nouveau, fondé sur une logique irréfutable, sur l'absurdité des codes humains, sur l'engrenage des mots.
Plus tard, beaucoup plus tard, viendront Boris Vian, Marcel Aymé, Raymond Queneau, Raymond Devos, Coluche... Le fil qui les relie à Cros est aussi solide que la ficelle - longue, longue, longue, au bout de laquelle un hareng saur très lentement se balance - toujours, toujours, toujours...
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