« Une des phrases les plus singulières que j’aie jamais lues est assurément une phrase d’Aristote qui dit que les arbres dorment. Quelques-uns des chênes de Savannah doivent rêver au temps où la ville n’était pas et où les aigles couleur de bronze venaient se poser sur leurs bras étendus ; et sans doute rêvent-ils aussi à la forêt vierge toute proche et dont l’heure reviendra quand la ville ne sera plus. Ces grands personnages prophétiques donnent à Savannah une gravité particulière ; ce n’est pas qu’ils la menacent, mais ils l’avertissent avec bonté que nos petites cités humaines disparaîtront enfin, avec le temps, et que le végétal reprendra ses droits. »
« La France et l’Amérique sont dans la situation d’excellents amis qui s’écrivent trop peu. Dans les circonstances actuelles, c’est à la France à écrire ; elle doit à l’Amérique une de ces lettres copieuses et bavardes comme on aime tant à en lire chez nous. Sans doute, l’amitié subsiste si la lettre n’arrive pas, mais est-ce tout à fait la même chose ? »
Ces brefs extraits de Mon Amérique donneront mieux que de banals superlatifs une idée de ce riche et somptueux recueil de Julien Green sur sa patrie d'origine, qui nous restitue un très grand écrivain au faîte de son art.
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