Née dans le Médan d'Émile Zola en pleine affaire Dreyfus, issue d'une famille d'artistes
peintres désargentée, Mireille Havet fascine très jeune tous ceux qui l'approchent
: elle n'a pas quinze ans quand Apollinaire publie ses premiers poèmes, et en
compte dix-neuf quand paraît son récit La Maison dans l'oeil du chat, préfacé par une
Colette enthousiaste. Auteure en 1923 d'un roman acclamé par André Gide et René
Crevel (Carnaval), Mireille Havet atteint sa maturité d'écrivain dans son extraordinaire
journal intime, exhumé par miracle en 1995.
Séduisant hommes et femmes par son charme androgyne et sa liberté d'esprit, elle
affirme dès l'adolescence une homosexualité sans tabou, qui lui fait vivre les liaisons
les plus torrides. Le goût des drogues et une pauvreté croissante précipiteront hélas
la garçonne flamboyante, égérie du Paris des années folles, dans la dépression et
l'impuissance. Interprète du rôle de la Mort dans l'Orphée de son ami Jean Cocteau,
la «petite poyétesse» d'Apollinaire meurt tuberculeuse et oubliée, à trente-trois ans.
Fulgurante, passionnée, son existence illustre de manière exemplaire la trajectoire
d'une génération que le traumatisme de la Grande Guerre livra à tous les excès.
Petite soeur méconnue de Raymond Radiguet, Pierre Drieu La Rochelle ou Louis
Aragon, Mireille Havet eut comme seule boussole l'exaltation d'un moi qui trouva
dans le sexe, la poésie, le noctambulisme et les paradis artificiels ses pistes les plus
fécondes.
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