Le 1er juillet 1957, à Garanhuns (Pernambouc), le Padre Hosana de Siqueira abat Mgr Expedito Lopes, son évêque, de trois coups de revolver tirés à bout portant. Par son exceptionnalité, sa dimension scandaleuse mais aussi sa charge symbolique, l’affaire fait grand bruit, bien au-delà du Nordeste. À partir des perspectives ouvertes par la microstoria italienne, avec ses jeux d’échelles, il est vite apparu que le fait divers, convenablement questionné, pouvait parler bien plus que de lui-même et servir de révélateur aux forces profondes qui travaillaient alors l’Église et la société. Ainsi, la richesse des archives a-t-elle permis d’analyser avec minutie l’univers des clercs de ce diocèse périphérique, de prendre la mesure de sa faible romanisation, voire, contre toute attente, de la fragilité du pouvoir épiscopal. Mais l’homicide, en tant que transgression radicale des hiérarchies les plus sacrées, s’est aussi trouvé investi d’un fort contenu sociopolitique. Dans la conjoncture de radicalisation du Nordeste, il s’est transformé en marqueur entre les camps de l’« ordre » et du « désordre », comme l’ont illustré les procès à Recife. Enfin, le fait divers a aussi offert un riche matériau permettant d’analyser, sur un demi-siècle, la mémoire et les usages du crime. Les oublis sélectifs, les amnésies, les retours mémoriels et les ratés de l’entreprise de béatification de l’« évêque martyr » en disent long sur le monde des fidèles et le catholicisme populaire, les stratégies changeantes de l’Église ou l’univers profane. Finalement, par petites touches, c’est à l’instantané d’une Église nordestine en société, à la veille du Concile et aux tentatives d’instrumentalisation mémorielle, que le crime du Padre Hosana nous ouvre l’accès.
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