« Je louerois davantage vostre œuvre, si elle ne me louoit tant, ne voulant qu’on attribue la louange que j’en ferois plustost à la philaftie qu’à, la raison, ni que l’on pense que, comme Themistocle, j’estime celuy dire le mieux qui me loue le plus. C’est un commun vice aux femmes de se plaire aux louanges, bien que non meritées. Je blasme mon sexe en cela, et n’en voudrois tenir cette condition. Je tiens neantmoiris à beaucoup de gloire qu’un si honneste homme que vous m’aye voulu peindre d’un si riche pinceau. En ce pourtraict, l’ornement du tableau surpasse de beaucoup l’excellence de la figure que vous en avez voulu rendre le subject. Si j’ay eu quelques parties de celle que m’attribuez, les ennuys les effaceant de l’exterieur, en ont aussi effacé la souvenance de ma memoire. De sorte que, me remirant en votre discours, je ferois volontiers comme la vieille madame de Rendan, qui, ayant demeuré depuis la mort de son mary sans veoir miroir, rencontrant par fortune son visage dans le miroir d’un aultre, demanda qui estoit celle-là. Et, bien que mes amis qui. me voient me veulent persuader le contraire, je tiens leur jugement pour suspect, comme ayans les yeux fascinez de trop d’affection. Je croy que quand vous viendrez à l’epreuve, vous serez en cela de mon costé, et direz, comme souvent je l’escris, par ces vers de du Bellay : c’est chercher Rome en Rome, et rien de Rome en Rome ne trouver. »
Fruit d’une sélection réalisée au sein des fonds de la Bibliothèque nationale de France, Collection XIX a pour ambition de faire découvrir des textes classiques et moins classiques dans les meilleures éditions du XIXe siècle.
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