Adrien Bourgogne (1785-1867)
"Ce fut au mois de mars 1812, lorsque nous étions à Almeida, en Portugal, à nous battre contre l’armée anglaise, commandée par Wellington, que nous reçûmes l’ordre de partir pour la Russie.
Nous traversâmes l’Espagne, où chaque jour de marche fut marqué par un combat, et quelquefois deux. Ce fut de cette manière que nous arrivâmes à Bayonne, première ville de France.
Partant de cette ville, nous prîmes la poste et nous arrivâmes à Paris où nous pensions nous reposer. Mais, après un séjour de quarante-huit heures, l’Empereur nous passa en revue, et jugeant que le repos était indigne de nous, nous fit faire demi-tour et marcher en colonnes, par pelotons, le long des boulevards, ensuite tourner à gauche dans la rue Saint-Martin, traverser la Villette, où nous trouvâmes plusieurs centaines de fiacres et autres voitures qui nous attendaient. L’on nous fit faire halte, ensuite monter quatre dans la même voiture et, fouette cocher ! jusqu’à Meaux, puis sur des chariots jusqu’au Rhin, en marchant jour et nuit.
Nous fîmes séjour à Mayence, puis nous passâmes le Rhin ; ensuite nous traversâmes à pied le grand-duché de Francfort(9), la Franconie, la Saxe, la Prusse, la Pologne. Nous passâmes la Vistule à Marienwerder, nous entrâmes en Poméranie, et, le 25 juin au matin, par un beau temps, non pas par un temps affreux, comme le dit M. de Ségur, nous traversâmes le Niémen sur plusieurs ponts de bateaux que l’on venait de jeter, et nous entrâmes en Lithuanie, première province de Russie."
Le sergent Adrien Bourgogne témoigne sur la campagne de Russie et la tristement célèbre retraite à laquelle il a réussi à survivre.
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