Ce texte est un archipel de dialogues. Il a l'apparence et la
rigueur de la littérature théâtrale ; il n'en ressortit pourtant
pas. Le téléphone en est le pivot et la fable : par lui, à travers lui,
surgissent des personnages venus d'on ne sait quelle comédie
exquise et amère : voyez ces étranges hurluberlus qu'on croirait
appartenir au monde d'un Dario Fo, ou ces jeunes toxicomanes
avec qui la narratrice a mené une expérience de désintoxication
par la force du langage dont le théâtre est précisément l'expérience
la plus souple, la plus libératrice et la plus sacrée.
Mais nous sommes d'abord dans l'univers de Liliane
Atlan, c'est-à-dire jusqu'à l'ultime conséquence d'un mode
d'écriture qui fait du grotesque un art à part entière : ce livre inénarrable,
tendre, fou, est une recherche permanente d'un bonheur
décidément illusoire ; là où le pathétique des situations aurait
créé ses niches ordinaires, nous avons un festival de mots truculents.
Ce sont ces mots qui engendrent à la fois ces dits personnages
et ces situations.
Même les oiseaux ne peuvent pas toujours planer est sorti
en allemand chez l'éditeur Rüdiger Fisher, à partir du manuscrit
original, en 2006. C'est le seul texte que la dramaturge, dont la
réputation n'est plus à établir, consent d'appeler «roman». Il en
possède la liberté et l'originalité. Son secret tient d'abord à un
style particulier - dans son théâtre, ou dans ses récits, il a été
distingué et célébré il y a déjà plusieurs décennies.
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