Les anecdotes biographiques concernant Marie Bonaparte sont aujourd'hui bien plus célèbres que son oeuvre scientifique. Elle fut à la fois l'arrière petite-nièce de l'Empereur, la princesse de Grèce et du Danemark, ainsi que l'élève et l'amie de Sigmund Freud. Cette proximité avec ce dernier et son rôle capital dans le développement de la psychanalyse en France ont fait d'elle une véritable figure de l'orthodoxie du freudisme chez ses contemporains. Pourtant, Marie Bonaparte a développé une conception de la discipline - ancrée dans les sciences naturelles plutôt que dans les sciences humaines - à contre-courant des idéaux de la psychanalyse française de l'après-guerre. Aujourd'hui, lorsque l'on évoque son nom c'est généralement avec ironie voire avec moquerie.
L'ouvrage de Rémy Amouroux, qui s'appuie sur une étude approfondie d'archives en grande partie inédites ou méconnues, retrace l'univers intellectuel et culturel dans lequel vivait la princesse de Grèce. Il explore ses différents réseaux relationnels : les milieux psychanalytiques mais aussi scientifiques et littéraires. On y croise des scientifiques de l'Institut Pasteur, des écrivains de l'avant-garde littéraire, et des personnages étonnants comme Gustave Le Bon qui fut, avant Freud, son premier mentor. En replaçant l'oeuvre scientifique de Marie Bonaparte dans son contexte, ce livre montre que sa lecture biologisante du freudisme n'avait alors rien d'exceptionnel et constituait une vision, certes originale, mais néanmoins admise. Plutôt que de discréditer ou de réhabiliter Marie Bonaparte, cet ouvrage cherche à lui restituer sa part d'inactualité.
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