María Zambrano est à la fois une philosophe, c'est sa formation, et une poète, c'est son inclination. Elle écrit des sortes de poèmes philosophiques qui tout ensemble émeuvent, donnent à voir et à penser, s'inscrivent très profondément dans la mémoire, agissent sur nous de l'intérieur et aident à vivre. Mais - est-ce parce qu'ils échappent à un genre défini, parce qu'en eux la pensée et la vision vont chercher d'elles-mêmes la forme où elles se diront ? - ils résistent à une lecture académique. Il est difficile de traduire Maria Zambrano, ce qui désespérait Camus qui ne trouvait pas de traducteur pour L'homme et le divin, il est tout aussi difficile d'écrire sur elle. J'ai mis plus de quinze ans avant de le tenter, et encore, timidement. J'ai essayé de différentes manières. La plus importante, qui n'apparaîtra pas ici, a été l'écriture poétique. Écrire des poèmes, c'était essayer de rejoindre Maria Zambrano. Ce n'était pas écrire sur elle mais avec elle, selon elle, dans la direction quelle m'indiquait par son oeuvre dans ma vie. Je pense que c'était une juste manière de lui être fidèle, de recevoir son enseignement. Ainsi, en écrivant, en la lisant, ma vie peu à peu s'ouvrait de l'intérieur, s'éclairait, se transformait, s'illuminait sans s'éblouir.
Jean Marc Sourdillon
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