L'origine de la comptine, cette formule que les enfants glissent au début d'une séance de jeu, est mystérieuse et controversée. Issue du chiffre qui précède la lettre, la comptine renvoie aux débuts. Début de l'être, début de la société, début de la communication. Sa nature est insaisissable.
C'est pourquoi il n'est pas question ici de chercher à définir la comptine turque, mais de la donner à lire et à dire. Il s'agit de faire pénétrer le lecteur dans ce fantastique laboratoire de langue et de culture qu'est la comptine. L'enfant en effet s'approprie la parole adulte, la manduque et l'enrichit d'énergies nouvelles. C'est le lieu de la parole sauvage zébré d'éclairs extérieurs. La comptine se transmet à la vitesse du son. N'est-il pas merveilleux de retrouver à Konya, au coeur anatolien de la Turquie, la comptine : « En ti ta / Jini jini pa / Kay sen siz / Geve dizi diz / Diz on suz (...) », qui, partie d'Ile-de-France sous la forme : « Un deux trois / Nous irons au bois / Quatre cinq six / Cueillir des cerises / Dix onze douze (...) », poursuit sa route en changeant de forme.
L'univers chaleureux de l'enfance reste en chacun de nous, progressivement recouvert par le loess de la socialité. Mais que vienne le tourbillon de la comptine et cette poussière impalpable est aussitôt balayée, et nous tendons à nouveau les mains de l'innocence dans un monde où tout redevient possible.
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