En bien des domaines, l'«amabilité» du XVIIIe siècle relève un peu du mythe, car à la façade brillante des Lumières répond un envers du décor surprenant de dureté et d'âpreté. Le roi lui-même en fut victime : s'il a le plus souvent choisi de grands ministres, s'il a pu garder à la France son rôle d'arbitre européen, s'il a voulu, et dans l'ensemble a su, assurer le bonheur de ses peuples, Louis XV - l'un des souverains les plus intelligents, les plus artistes, les plus cultivés, les mieux informés que nous ayons connus - a échoué à pacifier les esprits et à sauver l'Etat de la paralysie.
Fêté dans les premières années de son règne comme un véritable prince charmant, le Bien-Aimé a vite dû se résigner à régner sous les clameurs d'une opinion manipulée par quelques groupes de pression, essentiellement des jansénistes et ces «Messieurs des parlements» (c'étaient d'ailleurs les mêmes).
Dans cette lutte acharnée, il eût fallu à Louis XV l'habileté d'Henri IV, la brutalité de Richelieu, l'orgueil de Louis XIV - ou même les trois à la fois ! Or, bien qu'il les égalât au moins par l'intelligence, Louis XV était un homme secret, solitaire, introverti, doutant éternellement de soi. Et les femmes ne lui furent d'aucun secours : la Pompadour a flatté ses faiblesses plutôt qu'elle ne les a contrecarrées, la Du Barry s'est laissé entraîner dans des cabales qui la dépassaient... Ainsi s'explique que les réformes, les actes d'autorité aient mis si longtemps à venir - trop tard - et que la défaveur du roi auprès des Français ait perduré presque jusqu'à nos jours...
Seul un historien possédant une érudition infaillible sur le fonctionnement de l'Etat et du gouvernement de l'ancienne France pouvait faire justice de tant de préjugés, et montrer que le long règne de Louis XV - 59 ans ! -, s'il fut difficile, doit pourtant compter parmi les grandes époques de notre histoire.
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