Nul autre que Lin Yutang, lettré chinois
pétri de culture occidentale - qui disait
«penser en chinois avec un pinceau et
en anglais avec une machine à écrire» -
pouvait réussir à nous éclairer sur le sens
que nous donnons au mot «bonheur» en
Occident et en Chine.
«Quel peut être le but de la vie, si ce
n'en est la jouissance ?» Et cette vie
qui est la nôtre, déjà en 1938, date où
il écrit ce livre, il déplore qu'elle soit
«trop compliquée, notre science trop
sérieuse, notre philosophie trop sombre
et nos pensées trop embrouillées». Aux
petits soldats obéissants que nous sommes,
l'antique sagesse chinoise oppose la figure
du «vagabond» : recherchant l'oisiveté,
cultivant un esprit libre, dont l'aspiration
à l'idéal se tempère d'un désenchantement
rieur. Convoquant ses «compagnons
spirituels», poètes et philosophes chinois,
mais aussi Thoreau ou Nietzsche, il fait
l'éloge d'un homme pleinement homme,
capable de goûter à toutes les saveurs de
l'existence. Car le banquet de la vie est
devant nous et la seule question qui se pose
est celle de notre appétit.
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