Sibérie, hiver 1957. Après une longue marche sur les rives de la Koureïka, trempé, affamé, épuisé, Andréi Tarkovski (il n'a que vingt-cinq ans) remarque « un fragment de glace portant la trace orange de pollen emporté par la pluie, et dans la cavité duquel pousse un lys mouillé parsemé de mouchetures violet sombre. Inutile de s'extasier devant tant de splendeur, il suffit d'un coup d'oeil las et rapide pour s'en souvenir à jamais afin de pouvoir en parler comme d'un miracle ».
Koweit, automne 1991. Sophie Ristelhueber arrive six mois après le conflit : « Il n'y avait déjà plus que des squelettes, habillés dans des tenues militaires impeccables et à moitié enterrés. Je ne les ai pas photographiés (...). » Arpentant un terrain dangereux : « J'aurais pu marcher sur une bombe enfouie dans le sable », dit-elle.
Deux artistes, deux marcheurs. L'un, cinéaste. L'autre, photographe.
Certaines images, à peine capturées, fanent et meurent. Ici, au contraire, l'image en cours nous prend au corps. Nous l'incarnons. Dans une plongée parallèle et risquée, nous découvrons cinq diptyques qui déploient toutes les dimensions du temps. Nous approchons l'univers de Tarkovski et Ristelhueber, dont les motifs/hantise entrent en résonance.
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