Qu'y a-t-il de commun entre le personnage du Marchand de Venise de Shakespeare, Portia, le philosophe de la démocratie moderne, Spinoza, et le penseur de l'inconscient, Freud ? Ils inventent tous les trois une manière « marrane » d'être juif, en jouant la comédie de l'universalité pour laquelle ils cryptent ce qu'ils cherchent. Persécutés par l'inquisition, obligés de mimer la vie chrétienne, les Marranes portent en eux et au-delà un double jeu, une comédie judéo-chrétienne. Il ne s'agit pas pour eux d'une nouvelle religion, mais d'un secret et de nouvelles Lumières qui constituent peut-être un signe adressé aux temps à venir.
La scène judéo-chrétienne, habitée par les Marranes, est comme l'inconscient de la démocratie européenne, elle a été enterré par l'histoire et on a tenté d'effacer les traces. Les Marranes déjouent le trait d'union judéo-chrétien, en rejouant les équivoques des épîtres de Saint Paul. Ils nous invitent à repenser et à subvertir le théâtre qui commande, depuis ces épîtres, la pensée politique (notamment celle du sacrifice et de la guerre) et à libérer une tout autre idée de la démocratie : une vie libérée de la politique religieuse et de la religion politique (qui se développent, aujourd'hui, sur l'économie abyssale de la dette, de la pauvreté et de la misère). Les Marranes nous obligent aussi à interroger la philosophie contemporaine qui oscille entre l'anamnèse et l'amnésie du théâtre judéo-chrétien de la pensée politique.
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