Voici un siècle que Max Weber est mort. Ses thèses, parfois audacieuses, font encore couler beaucoup d'encre aujourd'hui. Auteur en sciences humaines parmi les plus lus, cités, convoqués dans la sphère publique et intellectuelle, le sociologue allemand du début du XXe siècle avait avancé que l'essor du capitalisme au XVIe siècle puisait certaines de ses origines dans la conduite quotidienne des protestants puritains anglais. C'est la thèse d'un chercheur inclassable. Les historiens français, sinon francophones, de Lucien Febvre à Fernand Braudel en passant par Henri Pirenne, seront des obstacles, à de rares exceptions, à la diffusion des thèses de Weber, qui mirent plusieurs décennies avant d'être traduites en français. Ce livre porte sur l'histoire d'un refus, d'une absence de désir d'une communauté de savoir à l'égard d'un auteur auquel on reproche de maltraiter la causalité en histoire, de pratiquer l'anachronisme, le jugement de valeur, de jargonner, d'incarner une science allemande dont la rationalité n'a pas évité deux guerres mondiales et d'avoir lancé un défi hors norme à la notion de discipline. Cette occultation de Weber donne à voir un impensé des intellectuels et des historiens dans la France du XXe siècle siècle. Ce qu'ils n'ont pas lu ou refusent de comprendre nous informe avant tout sur eux-mêmes.
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