L'Éternel dans le fini
Rencontre de Maître Eckhart et de Simone Weil
Depuis que Heidegger a clos la porte du débat métaphysique, les gens sérieux ont reporté les espoirs du peuple sur la morale laïque, ou citoyenne ; bref, les autorités du penser-qui-compte nous ont fait passer le discours du matérialiste imaginaire. Cet homme-là ne croit qu'en lui-même, tel qu'il se réalise en civilisation marchande. Dans le privé, c'est-à-dire le premier cercle de sa sphère privée d'existence, il connaît l'angoisse métaphysique. C'est que, s'il est parfaitement capable de traiter les autres comme des pierres, il n'y parvient pas pour lui-même, et d'autant moins qu'il a accumulé beaucoup.
Nos maîtres à penser, de petits-maîtres en vérité, conseillent le sport et le développement durable comme remède aux plaies vives ; ce sont de tristes sires. Autrefois, Maître Eckhart (qui fut accusé d'hérésie) enseigna, éclairé par la joie, que le divin est en nous, non pas nous-mêmes dieux, mais dessein d'aller à l'éternité, amour du prochain, non pour ce qu'il est comme tel, mais en tant qu'il participe du désir de clarté, de justice et de partage. D'autres, que nous connaissons ou méconnaissons, éclairèrent le chemin. Puis vint Simone Weil, qui se nomme elle-même pécheresse (et fut accusée des pires crimes), et trouve, dans la souffrance d'exister, la tension vers ce qui dépasse la créature, l'inconnaissable qui tourmente les âmes refermées et rétives. Mieux vaut, dit-elle, ne pas croire en Dieu que prétendre le connaître, pis encore lui parler.
Il est en nous une liberté absolument inconditionnée, sans esprit de puissance ni de restitution, qui mène à la découverte du divin dans le moi, à l'instant où le moi s'efface et s'offre à l'être qui l'accueille. La vie tient en nous : ni illusion ni superstition ; ni élection ni châtiment.
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