Raymond Penblanc est tombé dans une bouteille d'encre quand il avait 8 ans. Encre violette des enfants sages qui ne deviennent pas forcément des adultes soumis. Apprécie les formes mixtes. Aime marier prose narrative et poésie. Fait dans le court (parfois très court) comme dans le long (jamais très long). Utilise volontiers le gueuloir.
Dans la cuisine, le Père vient de mourir. Juste au-dessus, cloîtré dans le grenier, le Fils veille. Terrifié, il se refuse à intervenir. À partir du lendemain, les visites au défunt se succèdent, sans que le Fils consente à se montrer. Mais sous son crâne, les pensées se bousculent.
« Pap buvait son Ricoré quand ça lui a pris. Le verre a roulé sous la table, sans se briser, une petite flaque s'est formée par terre, j'ai failli marcher dedans. Surtout ne toucher à rien. La chaise renversée ne sera pas relevée. Mademoiselle Félicie doit venir demain, pour le ménage et la toilette de Pap, et demain elle trouvera Pap refroidi, raide. Quant à moi, me voilà pour de bon orphelin, orphelin complet. Avant, quand je prononçais ce mot, je flottais dedans comme dans un habit trop grand, à présent je le trouve trop étroit. J'ai envie de pleurer comme un enfant et de rire comme un vieillard. La boîte de sucre est restée sur la table, je remplis ma poche d'une dizaine de morceaux, j'en croque un pour me soulager, pour éprouver un semblant de douceur, mais il me râpe le gosier. Je serre les dents, je m'empêche de tousser. Et alors ? Est-ce que de tousser, d'éternuer, de cracher par terre ou de péter réveille les morts, les ramène à la vie ? Est-ce que ça les dérange ? Est-ce que ça les tue davantage ? Pauvre Pap, dans ma hâte j'ai failli heurter sa tête. Elle est pourtant bien accrochée à ses épaules. »
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