«Ma mémoire est une foule noire couronnée de drapeaux
rouges, et elle s'appelle Madeleine. Madeleine, c'est la
Basilique de Vézelay. Madeleine, c'est ma grand-mère.
Madeleine, c'est moi. C'est elle qui, la première, m'a raconté notre
histoire. J'avais quatre ans, j'avais dix ans, j'avais seize ans. Dans sa
voix, j'écoutais d'autres voix, venues du fond des siècles : la voix de
Jules, son père, la voix de Jules-Antoine, son grand-père, la voix du
grand-oncle Armand Perreau déporté en 1852, la voix de Camélinat,
venant redire à la forge ses conversations avec Marx et Jaurès, la
fondation de la Première Internationale ouvrière et l'écrasement de
la Commune ; la voix, plus proche, dans la salle à manger des Cités,
à Migennes, de René le résistant ou de Prosper Môquet, le député
communiste de l'Yonne, et de sa femme Juliette. Huit générations de
Rouges. Voici leur histoire, notre histoire, votre histoire.
«Contre les accusations d'avoir été les fourriers d'un nouveau
fascisme, je ne plaide pas l'innocence. Je veux juste nous donner
une chance de comprendre qu'aucun régime politique n'incarnera
jamais une définitive justice. Et que le combat doit être indéfiniment
recommencé. Je veux donner une chance à Madeleine de dire enfin je.»
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