Psychiatres, psychanalystes, thérapeutes, psychologues : la planète psy semble à bout de souffle. Il est urgent d'injecter dans ces vains débats un peu de "principe de réalité".
Depuis le début des années 2000, le " monde des psys " est en crise, particulièrement en France. D'un côté, la psychanalyse est contestée ou réduite à une référence ennuyeuse et répétitive. De l'autre, les thérapies comportementales et cognitives (TCC) ont le vent en poupe, inspirant deux inquiétantes études de l'Inserm consacrées aux " troubles mentaux " et aux " troubles des conduites chez l'enfant et l'adolescent ". Renouant avec des théories du XIXe siècle tout en instrumentalisant les derniers résultats des neurosciences, leurs auteurs proposent une médicalisation des problèmes sociaux : ne pas trouver un emploi, participer à des émeutes en banlieue, ce serait d'abord la manifestation d'un trouble mental... Pour contrer cette double dérive, pour inventer collectivement de nouvelles formes de prise en charge de la souffrance psychique, explique Philippe Pignarre dans ce livre, il faut se détourner des théories figées. Et s'intéresser aux mécanismes et aux objets qui, en partie à l'insu des thérapeutes, proposent aux patients de nouvelles manières de vivre. Il montre ainsi que les médicaments psychotropes, devenus incontournables, ont joué un rôle central dans ces évolutions, contribuant à construire une nouvelle " cité psy ", alors que l'ancienne est en ruines. Une cité qui n'est pas sans dangers, comme le prouve la critique serrée faite ici des deux rapports de l'Inserm. C'est une conviction forte qu'entend affirmer Philippe Pignarre : on ne sortira pas de ces impasses sans comprendre les causes profondes qui y ont conduit.
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