Au XIe siècle le savant iranien Al-Bîrûnî avait rapporté d'Inde un célèbre
Livre de l'Inde ; huit siècles plus tard, ce n'est pas seulement une
immense somme de connaissances, mais les oeuvres mêmes de l'Inde
qui font leur apparition dans la vie littéraire européenne, et française,
lorsque, avec la colonisation britannique, naît et se développe l'orientalisme
savant occidental. Traduits, lus avec passion, abondamment
commentés, ces livres de l'Inde aujourd'hui ignorés des lecteurs fournissent
un cas exemplaire d'appréhension d'une littérature étrangère,
d'autant plus instructif qu'il se trouve exactement contemporain de
l'émergence d'une nouvelle discipline universitaire, la littérature étrangère.
La réception de la littérature indienne au XIXe siècle en France
permet de ce point de vue d'interroger la catégorie même de littérature
étrangère : la disparition de la littérature indienne en français à la fin
du siècle est aussi celle d'une approche de la littérature dont elle contribua
à révéler les limites.
Mais ces limites dessinent aussi peut-être les contours des lectures
possibles. L'histoire singulière des lectures françaises de la littérature
indienne au XIXe siècle conduit à opposer deux modalités de réception
des textes étrangers : l'écho, figure de la cacophonie d'un monde
moderne envahi de mots et d'échos de mots, thématisé aussi bien par
Dickens, T.S. Eliot qu'E.M. Forster ; et ce qu'on appellera résonance,
accomplissement d'un texte dans l'effet produit sur son destinataire,
dont on trouve une élaboration originale dans la poétique indienne
sous le nom de dhvani.
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